Vous pouvez regarder la cérémonie qui a eu lieu dimanche 8 août 2021 à 15h, en direct du Village des Pruniers sur YouTube.
En cette période où beaucoup d’entre nous ont connu la douleur d’être séparés de leurs familles et de leurs proches, le dimanche 8 août nous avons pris un moment en tant que communauté pour contempler et chérir ceux qui sont aussi proches de nous que nos propres corps, et poursuivre une tradition que nous avons pratiquée avec notre maître Thầy (maître zen Thich Nhat Hanh) chaque été depuis la fondation du Village des Pruniers.
« Si vous regardez profondément dans la paume de votre main, vous verrez vos parents et toutes les générations de vos ancêtres.
Tous sont vivants en ce moment. Chacun d’eux est présent dans votre corps.
Vous êtes la continuation de chacune de ces personnes. »
–Thich Nhat Hanh
Que représentent nos parents pour nous ?
Pouvons-nous voir la présence de nos parents en nous aujourd’hui ? Quel rôle leur amour, leur présence et leur absence ont-ils joué dans notre vie ?
Que nos parents soient encore en vie ou décédés, que nous ayons une bonne relation avec eux, une relation difficile ou pas de relation du tout, renforcer notre relation avec les personnes qui nous ont donné la vie peut nous nourrir et nous guérir.
En cette période où beaucoup d’entre nous ont connu la douleur d’être séparés de leurs familles et de leurs proches, nous avons pris un moment en tant que communauté pour contempler et chérir ceux qui sont aussi proches de nous que nos propres corps, et poursuivre une tradition que nous avons pratiquée avec notre maître Thầy (maître zen Thich Nhat Hanh) chaque été depuis la fondation du Village des Pruniers. Cette année, c’est la première fois que nous avons eu l’occasion de partager cette célébration avec notre communauté élargie en ligne.
La cérémonie des roses est l’expression vivante de la gratitude de notre communauté envers nos parents. Nous aurons la possibilité d’écouter ensemble « Une rose pour votre boutonnière« , un poème en prose écrit par Thầy après le décès de sa propre mère. Tissé à travers les passages du poème, la communauté offrira des chansons et d’autres cadeaux de notre cœur, pour nous aider à toucher la présence et l’amour de nos parents dans le moment présent.
Tout le monde est invité à nous rejoindre et à préparer un petit espace à l’atmosphère belle et paisible pour l’occasion. Vous pouvez inclure une rose ou une autre des fleurs préférées de vos parents et inviter vos proches à se joindre à vous en ligne ou en personne et partager un court poème ou une chanson avec elles.
À la fin, nous aurons un moment pour déguster du thé et une petite collation (comme des biscuits) ensemble, et pour pratiquer la méditation de l’étreinte avec les personnes présentes.
L’événement a été retransmis en direct sur YouTube en anglais, français et en vietnamien.
Discussion avec le maître zen Thích Nhất Hạnh sur son livre “Une Rose pour votre Boutonnière”
Une interview par le magazine bouddhiste vietnamien Nguyệt San Giác Ngộ, en 2008.
Quảng Kiến: Après la publication de votre livre Une Rose pour votre Boutonnière, vous avez créé un mouvement de commémoration de l’amour maternel. Où avez-vous lancé ce mouvement, dans la fête Vu Lan (fête traditionnelle vietnamienne pendant laquelle on exprime sa piété filiale) de quelle année, et quels obstacles avez-vous rencontré dans la création de cette belle tradition?
Thầy: Je n’ai jamais eu l’intention de lancer un mouvement. Ce mouvement est apparu naturellement, et j’en fis le premier surpris. En 1962, après neuf mois passés à étudier la religion comparée à l’université de Princeton (aux États-Unis), je pris des vacances au Camp Ockanickon, à Melford, dans l’État du New Jersey.
Je passais mes journées avec des adolescents. Nous faisions du bateau à rames sur un lac et je leur parlais de la culture vietnamienne. Mes soirées, quant à elles, étaient consacrées à l’écriture. J’ai écris le livre Une Rose pour votre Boutonnière dans une petite cabane en bois que l’on m’avait réservé. Après l’avoir écrit, je l’ai envoyé à ma disciple Trương Thị Nhiên pour qu’elle le partage à mes autres étudiants en Bouddhisme de Saigon. Ils étaient très émus et ont décidé de le partager. Ils ont produit 300 copies, toutes à la main, qu’ils ont offertes en cadeau à leurs amis de l’université de Saigon. À chaque copie, ils ont joint une rose rose à ceux qui avaient encore leur mère, et une rose blanche à ceux qui avaient perdu leur mère.
La même année, pendant la pleine lune du mois de juillet, ils se sont réunis au temple Xá Lợi pour organiser la toute première Cérémonie des Roses. Tôn Thất Chiểu, un membre de l’association d’étudiants en Bouddhisme, a envoyé une copie de mon article au vénérable Thích Đức Tâm, qui était à l’époque le rédacteur en chef de la revue mensuelle Liên Hoa, tenue par l’Église de la Sangha du Centre (du Vietnam). Le magazine a publié son contenu sous le titre “Prendre Conscience de sa Maman.” Le vénérable Trí Thủ, le maître du vénérable Đức Tâm, a eu les larmes aux yeux en lisant l’article. Après cela, on a publié le livre Une Rose pour votre Boutonnière et de nombreux temples ont commencé à organiser leur première Cérémonie des Roses. C’est ainsi que le mouvement a commencé.
Je ne pense pas qu’il y ait eu d’obstacle à la croissance de ce mouvement. La première édition du livre Une Rose pour votre Boutonnière, publiée en 1964 par la maison d’édition Lá Bối, étaient longues et très fines, pour qu’elles puissent être glissées dans une enveloppe et envoyées comme cadeau de fête des mères (Vu Lan). Le livre a été réimprimé de nombreuses fois et traduit dans de nombreuses langues telles que l’anglais, le français, l’allemand, le hollandais, le chinois, le russe, le thailandais et le laotien. En 1965, le groupe de théâtre musical vietnamien (Cải Lương) Thanh Minh Thanh Nga a créé une pièce basée sur Une Rose pour votre Boutonnière et m’a invité à y assister.
Quảng Kiến: Selon vous, quels sont les points communs et les différences entre les façons de célébrer la fête des mères dans la culture vietnamienne et la culture japonaise?
Thầy: Les cérémonies des roses organisées au Village des Pruniers chaque été depuis 1983 sont empreintes de la culture vietnamienne, donc différentes de leurs origines japonaises. Nous n’honorons pas seulement notre mère mais également notre père en accrochant une seconde rose. Si notre père est encore en vie, nous accrochons une rose rose, et s’il est décédé, une rose blanche.
Quảng Kiến: Beaucoup de gens se demandent, pourquoi avez-vous choisis une rose plutôt qu’un autre type de fleur? Est-ce simplement parce que la rose est le symbole de l’amour?
Thầy: Nous pouvons substituer toute autre fleur rouge à la rose rouge. Un œillet rouge, par exemple, pourra être utilisé. De la même façon, pour commémorer un parent décédé, nous pouvons utiliser n’importe quelle fleur blanche. En 1965, mes disciples taïwanais ont utilisé des œillets communs rouges et blancs pour leur Cérémonie des Roses. Un œillet rouge pour un parent encore en vie, et un œillet blanc pour un parent décédé. Encore une fois, n’importe quelle fleur peut être utilisée – une orchidée, par exemple.
Quảng Kiến: Le compositeur vietnamien Phạm Thế Mỹ a mis en musique une partie de votre article Une Rose pour votre Boutonnière, aidant votre message à se pénétrer dans la culture populaire. Quelle a été votre impression en écoutant cette chanson pour la première fois, et au jour d’aujourd’hui, comment vous sentez-vous en l’écoutant?
Thầy: La chanson de Phạm Thế Mỹ est très douce et naturelle, comme la respiration, ou comme une promenade, ou comme une gorgée de thé. Je ne vois pas Phạm Thế Mỹ comme une personne séparée de moi, lorsque j’entends cette chanson. Cela a toujours été mon sentiment.
Quảng Kiến: Je vous sais très soucieux de la jeunesse, pas seulement au Vietnam mais partout dans le monde. Quel conseil aimeriez-vous offrir aux jeunes qui nous lisent?
Thầy: La Cérémonie des Roses n’est pas qu’une célébration de la piété filiale. Le jour de la cérémonie, pratiquez le regard profond (la contemplation). Voyez les talents et les belles qualités que vous avez hérité de vos parents. Voyez comme vos parents n’existent pas seulement à l’extérieur de vous mais également en vous. Vous êtes la continuation de votre père et votre mère. Vous apportez vos parents en vous vers le futur. Apprenez à sourire pour votre mère, à respirer pour votre père, et à marcher en pleine conscience pour les deux. Continuer ses parents en beauté, c’est la meilleure expression de la piété filiale. Si vous avez des difficultés avec vos parents, n’imaginez pas qu’ils ne vous aiment pas. Il se peut que leurs erreurs du passé ont créé une couche de souffrance en vous qui vous empêche de reconnaître l’amour qu’ils vous ont donné. Si quelque chose vous arrivait, vos parents seraient les premiers à pleurer de tout leur soûl. Et si quelque chose leur arrivait, vous pleurerez également. Vous devez voir comment les erreurs de vos parents sont dues à leur souffrance et leur incapacité à la transformer. Il en est de même pour vous. Vos incompréhensions et vos frustrations vous font souffrir et vous ont poussé à faire et dire des choses peu aimables à vos parents. Chaque partie porte une part de responsabilité. En identifiant la souffrance de vos parents, vous serez motivé par le désir de les aider. Excusez-vous pour ne pas avoir su aider vos parents, mais avoir créé plus de difficultés pour eux. En utilisant l’écoute profonde et la parole aimante, vous pouvez renouer le lien et restaurer la bienveillance entre vous. Beaucoup de mes disciples, au Vietnam comme ailleurs, ont réussi à le faire.
Trop de jeunes se suicident, par désespoir, mais aussi parfois pour punir ceux qui les ont fait souffrir, comme leurs parents. Si nous sommes venus au monde, c’est pour aimer, par pour punir. Mourir ainsi est un échec. Si nous sommes bouddhistes, nous devons savoir que les enseignements du Bouddha peuvent nous aider à transformer nos souffrances en bonheur et la haine en amour. Aujourd’hui, vous pouvez dire ou faire quelque chose pour rendre vos parents heureux. N’attendez pas demain, car il sera peut être trop tard. Si nous lisons Une Rose pour votre Boutonnière, c’est pour nous rappeler de cela.
Si vous accrochez une rose blanche à votre boutonnière, souvenez-vous que vos parents sont encore en vous, dans chacune cellule de votre corps. En regardant votre main, voyez la main de votre mère, de votre père. En posant votre main sur votre front, voyez la main de votre père ou votre mère toucher votre front. C’est merveilleux.
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